Pierre François (1935-2007) est un homme de son temps, de son quartier, de sa famille, de sa peinture. Tandis que certains artistes s'expriment par des ruptures : lui se régénère en improvisant sur un thème (comme en jazz), et par raccords (comme au cinéma).
Aimantes, désarmantes, ses œuvres ont les contours très ouverts de la mer, de la ville, de la foule, du bruit. Où que se porte le regard, des passages s'enluminent, libérant les oiseaux, les bâteaux, les poissons, les nuages, les vagues, les Vénus, créatures de toute la Création, musiciens de toute la bande, accessoires de tous les métiers, représentés sans entraves.
Intègre, il conserva l'esprit du jeu, qui est le génie de l'enfance. Il se disait "peintre décorateur", voyant légère et ornementale son action dans la société. Par une incessante récupération des choses de l'universel quotidien, il sut entretenir, très modestement mais pleinement, cette poésie essentielle vis-à-vis de laquelle un spectateur se met en immersion, pour le plaisir et sans peur de la noyade.
Travaillant volontiers en plein air, généreux en long et en large, faisant feu de n'importe quel matériau, haut en couleur, s'absorbant aussi bien dans des dessins très minutieux, multipliant les expositions dans tous les lieux possibles (sans oublier une rétrospective au musée de Sète), collaborant avec les troupes de théâtre, les éditeurs et bien d'autres artisans, Pierre François aura couvert une distance digne de la pêche au long cours : fluide, éolienne, avec sous le soleil, soudain, tout l'or du monde.
Texte de Bernard DERRIEU - 2012 -
pour l’exposition « L ‘art d’être libre »- Galerie Plurielle-